Brano: [...] Luporini, je voyais se dégager devant moi t’image d’un philosotphe d:e type nouve.au, d’un philosophe révolutionnaire par rapport à ceux qui avaient existé dans; le passé.
C’est cette image que je voudrais essayer de préciser. C’es,t de ce philosophe que je voudrais essayier d’esquisser briièvement le portrait.
Il existe, du philosophe, une figure traditionnelle, et Luporini l’évoquait, lorsqu’il panlait du fondateur de la phénoménologie, Husserl. Husserl a lui mème défini cette tàche — sa tàche — philosophique, lorsqu’il a dit : « Je suis le fbnctionnaire de l’humanité ».
Qu estce que cela veut dire dans son esprit? Cela veut dire que le philosophe se p'résente cornine quelqu’un qui inaugure véritablement la philosophie, comme quelqu’un qui tient en ses mains, et en ses seules mains, le sort de toute vérité; de telle sorte que les: autres n’aient p*lus qu’à necevoir cette vérité qu’il dit. Son dessein philosophique se présente devant lui comme le projet dune sèrie de démarehes par lesquelleis toute véirité pensabile au monde sera dite, mai[...]
[...]Gramsci on voit apparatore une autre philosophie, une autre figure de phiiosophe. On peut dire de Gramsci que lui aussi est un phiiosophe universel, et de lui aussi je dirais, à juste titre, quii a été le fonotionnaire de l’humanité, mais dune autre manière, dune manière révolutionnaire, par rapport aux desseins du phiiosophe de tyipe traditioninel.
En effet, voyons d’aibord ce quii en est de ioette fameuse naiveté dont le phiiosophe de tyipe husserlien prétend se séparer, dont il prétend faire la critique radicale, oecte naiveté du « vulgaire ». Comme fa montré Luporini, Gramsci ne méprise pas la naiveté. Au contraire; et dans ce sauri qu’il a de la 'naiveté il <n’y a pas seulement la volonté d’affirmer son lien organique aux masses populaires, pas seulement la volonté d’affirmer son lien avec le peuple qui souffre et dont « le sens commun » contient déjà, en première approximation, un élément de connaisìsance.
'Il y a aussi, il ime semble, que'lque chose de plus profond: te sauci réfléchi et dólibéré de ramener les idées à leur origi[...]
[...]aboration vraiment théorique: voilà me semblentil un souci en lui mème déjà philasophique.
Ce souci me semble toutàrfait fondé et de nature à éviter au phiiosophe de profession quelques mécomptes. On sait, en effet, qu’un problème tourmente le phiiosophe; celui du commencement de la philosophie, de 'la déterminati'On de la philosophie comme prò jet de vérité pur de tout préjugé: le problème d’une philosophie sans présuppositions, comme disait Husserll.
Cette prétention, Gramsci mentre comment elle s’effondre. Il n’y a pas de commencement absolu de la philosophie, mais il y a toujours,Jean De santi
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déjà élaborée, une certaine philosophie, un oertain degré de philosophie, une « philosophie commune ». Chacun y a accès du fait mème qu’il partecipe d’un mouvement de culture en voie de conisititution, et du fiait que ce mouvement cherche son chemin vers la .claire conscience et la forme d’expression universelle que peut lui donner la pensée par concepts.
Une formule revient à plusieurs raprises sous la piume de Gramsci : « c’es[...]
[...] le prix de la pensée théorique. Il nest pas un avare de la pensée, il neconomise rien, aucune démarehe si difficile ou si inhabituelle soitelle, pourvu que sa mise en oeuvre permette de voir mieux la nature des choses et de mieux dominer le devenir social.
Il me semble que c’est là, entre autres choses, le sens des « le^ons de philosophiie » que nous donne Gramsci. Et à propos de Gramsci je reprendrai volontier l’expression du viel idéaliste Husserl.
Le phiilosophe « fonctionnaire de Fhiumanité » ? Soiit. Cest une fière formule.
Mais de Husserl ou de Gramsci qui a été le fonctionnaire de Thumanité? Célui, me sembletil, qui, enfermé dains sa pirison, a pensé cependant dune manière universelle avec son peuple et pour lui. Ce fut Gramsci, et non Husserl.
Telles sont, chers amis, les quelques idées que j’ai voulu vous présenter. Je vous demande de mexcuser de l’avoir fait en frangais. Et je vous remercie de m’avoir donné loccasiion de relire ces textes de Gramsci et de nous avoir procuré, à nous Frangais qui sommes venus à ce Colloque, le plaisir d’apprendre de vous à mieux les connaitre.